En marge du feuilleton de l’affaire « Air-Cocaïne », voilà que l’on apprend que le nom de Nicolas Sarkozy figurait dans la procédure ouverte par la juge Christine Saunier-Ruellan . Rien de plus normal quand on sait que l’ancien Président a effectué trois déplacements à bord du Falcon 50 d’Alain Afflelou, dans le cadre de ses conférences, au Qatar, à Abu Dhabi et au New Jersey : son tort fut d’en avoir fait régler les factures par son ami Stéphane Courbit (ex-Endémol), fondateur de Lov-Group, une société ayant eu pour actionnaire Liliane Bettencourt, jusqu’en janvier 2015… Une aubaine, pour qui s’intéresse aux mouvements, aux contacts et, qui sait, aux conversations du Chef de l’opposition, à l’approche des « primaires » et de l’ élection présidentielle.
Par chance, Nicolas Sarkozy aura au moins échappé à une nouvelle mise en examen, pour complicité et recel, dans une affaire de stupéfiants : une mise en examen qui aurait été « difficile à avaler », sauf à inculper, pour le même motif, tous les banquiers de la planète…
La rocambolesque exfiltration des deux pilotes de l’appareil, Bruno Odos et Pascal Fauret, de la même manière, ne peut et ne doit pas occulter le fond de l’affaire « Air-Cocaïne ». Sans préjuger, en aucune manière, de l’innocence des pilotes (seule l’enquête déterminera leur degré d’implication…), au stade actuel, on ne saurait leur reprocher autre chose que d’avoir fait preuve d’une grande naïveté, ce qui, pénalement, n’est pas condamnable. Car, si les 680 kilos de cocaïne ont pu être acheminés et embarqués à bord du Falcon 50, à Punta Cana, sur le tarmac d’un aéroport international, c’est d’abord et avant tout grâce à la complicité des militaires dominicains de la Marine, en charge de la sécurité des aéroports, de membres de la Direction Nationale du contrôle des drogues, ainsi que celle de fonctionnaires français, dont un Capitaine des Douanes de Toulon, incarcéré, dans le cadre d’un transport similaire (dix valises, seulement ….), entre la République Dominicaine et St Tropez, peu de temps auparavant, le 9 décembre 2012.(VSD-28.3 et 4.7.2013.
Le 25 janvier de cette année, deux policiers de la PAF (Police de l’Air et des Frontières) étaient écroués après avoir été pris en flagrant délit, alors qu’ils venaient de récupérer 2 valises, en provenance de Punta Cana, contenant 40 kilos de cocaïne. Durant trois ans, ce « petit commerce » leur aurait rapporté 500 000 euros, à chacun.
Tout récemment, encore, le 12 novembre dernier, c’est un cadre d’Air-France, en charge des bagages à Roissy, qui était interpellé après avoir réceptionné une valise, en provenance du Brésil, contenant 30 kilos de cocaïne…
Avec un chiffre d’affaires de 350 milliards de dollars annuels (une fois et demie le PIB de la Grèce…), le marché de la drogue est aujourd’hui le premier au monde, devant celui de l’armement : largement de quoi acheter des fonctionnaires et personnages influents, peu regardants au plan de la morale et de la loi…
Roberto Saviano, écrivain et journaliste d’investigation italien, condamné à mort par la Camorra napolitaine, rapporte dans son dernier livre (« Extra pure »…) que la cocaïne constitue, de très loin le meilleur des investissements : « pour 1000 euros d’actions Apple, tout juste pourrez-vous espérer réaliser une plus-value de 300 à 400 euros, au bout d’un an. La même somme, investie sur le marché de la cocaïne, vous permet d’empocher, sur la même période, entre 180 à 200 000 euros de bénéfices… ». Qui dit mieux ?…
A défaut de racheter la totalité de la dette des Etats en grande difficulté, l’auteur avance que des centaines de milliards, tirés du narcotrafic, auraient contribué à aider les banques à se sortir de la crise des subprimes de 2008.
Comme on le voit, de la crise des banlieues à l’Afghanistan (89% de la production mondiale d’opium et 3000 tonnes de cannabis par an, depuis l’intervention américaine…), en passant part l’Amérique latine et le Maroc, le brouhaha médiatique savamment orchestré autour de l’exfiltration des deux pilotes français n’a pas eu d’autre effet que d’éviter d’aborder les sujets qui fâchent…
Autant dire que le feuilleton est loin d’être terminé…